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Editorial

Le grand défi des Barea

jeudi 11 juillet 2019 | Patrick A.

Cris de joie, concerts de sarom-bilany et de vuvuzela, feux d’artifice, pénurie de maillots et de drapeaux nationaux, échanges dans la rue ou à travers les réseaux sociaux : l’enthousiasme autour de l’épopée des Barea à la Coupe d’Afrique des Nations est indéniable et fait plaisir à voir. Cet élan traverse toutes les origines géographiques, localités de résidence, classes sociales, religions ou générations. De mémoire d’observateur, jamais la fierté d’être malagasy et le sentiment d’union nationale n’auront été aussi forts, et les jours de match font vibrer les cœurs plus que n’ont jamais pu le faire une commémoration officielle du 26 juin 1960 ou du 29 mars 1947.

Cette fierté ne peut être qualifiée de chauvinisme, car les indicateurs du fait que les réalisations des Barea constituent de véritables exploits sont indéniables. Peu de monde s’attendait à ce que notre pays figure à ce niveau car, si l’on se réfère au classement mondial FIFA où il figure seulement à une modeste 108è place, Madagascar était très clairement le moins bien côté parmi les pays présents aux huitièmes de finale de cette CAN. En fait, si l’on rapproche le classement des pays africains de la liste des pays ayant participé à ces huitièmes, les deux seuls « intrus » étaient le Bénin (18è pays africain) et Madagascar (25è pays africain). Figurer dans ces huitièmes était donc déjà très bien, être arrivé à aller plus loin pour atteindre les quarts dépasse tous les espoirs qu’on pouvait s’autoriser à formuler avant le début du tournoi.

Comme l’Islande, la débrouille en plus

Toutes choses égales par ailleurs, les Barea ont d’ores et déjà fait aussi bien que les Islandais, très inattendus quart de finalistes de l’Euro 2016 de foot-ball. Du coup, il n’est pas que des Malagasy à souhaiter que le meilleur soit encore à venir… Si tout un peuple espère que, aujourd’hui contre la Tunisie, les Barea pourront aller encore plus loin, il faut dès maintenant battre le fer tant qu’il est chaud, explorer la nature du changement, en saluer les grands acteurs et relever l’ampleur du chemin qui reste à parcourir.

La victoire a cent pères, mais la défaite est orpheline. C’est pourquoi, parmi les acteurs de cette réussite, on doit saluer en tout premier lieu Faneva Andriatsima qui a contribué sans compter lors des années de galère, puis subi au cours de cette CAN quelques critiques le plus souvent injustes, amnésiques ou irresponsables, sans que cela ne le démonte ni ne lui fasse perdre le sourire. Faneva Imà a su incarner l’amour du maillot et n’a jamais oublié qu’être capitaine d’équipe, et encore plus dans le contexte malgache, c’est bien plus que marquer des buts à titre individuel. Être un grand capitaine à Madagascar, c’est aussi avoir la volonté et l’esprit d’initiative pour démultiplier des fonds forcément insuffisants, travailler à convaincre les joueurs expatriés de venir rejoindre l’équipe nationale, et régulièrement rappeler au groupe qu’il y a d’autres raisons de se donner à fond que ces primes de match qui parfois défrayent la chronique en Afrique.

L’une des secrets de la réussite de la présente cuvée Barea aura été de parvenir à rassembler et à galvaniser, sans exclusive ni privilège, les meilleurs talents de joueurs, qu’ils soient connus ou méconnus, qu’ils habitent à Madagascar, en France ou en Algérie, ou qu’ils maîtrisent parfaitement ou non la langue malgache. L’essentiel de cette responsabilité reposait sur l’entraîneur Nicolas Dupuis, mais le caractère généreux et le carnet d’adresses du « vieux » Faneva Imà auront largement contribué à faire de cette sélection à la fois la plus mondialisée et la plus malagasy de nos équipes nationales.

Observateur à partir de mars 2016, entraîneur depuis mars 2017, Nicolas Dupuis n’a obtenu de la Fédération Malgache de Football un contrat officiel qu’en mars 2019. Qu’il ait réussi pendant tout ce temps à garder la foi et à s’investir dans de telles conditions dans un projet aux allures de chimère relève, au choix, du miracle ou de la magie de Madagascar.

Du pain et des jeux. La formule date de l’Antiquité et explique pourquoi la liste des dirigeants du football recoupe souvent les listes de députés et ministrables. Des personnalités célèbres, disposant sans doute d’influence et de compétences, mais pas toujours disponibles. La qualification des Barea a été obtenue dans un contexte de conflit interne, toujours pas résolu, au sein des instances officielles du foot-ball malgache. Dans un tel contexte, la débrouille et l’informel ont suivi les Barea jusqu’au Caire.

Grâce aux archives médiatiques qu’elle laisse, l’aventure des Barea est devenue une belle illustration de l’écart entre l’état de la gouvernance de Madagascar et son véritable potentiel. Le contraste est saisissant entre vie officielle des institutions d’un côté, et réalité vécue par associations ad hoc et autres vendeurs de rue de l’autre. L’ampleur soudaine prise par les événements amène les uns à courir et à adopter un peu des méthodes pragmatiques des autres. Le défi le plus grand que les Barea lancent, c’est en fait aux Malagasy eux-même qu’ils le lancent : que ce ne soit pas que l’équipe A des Barea qui sorte des galères et des quolibets.

8 commentaires

Vos commentaires

  • 11 juillet 2019 à 13:02 | dahalo (#8794)

    Cette équipe restera dans l’histoire de notre pays. On ne les remerciera jamais assez pour ce qu’ils ont fait et surtout pour tout ce que cela nous a amené. On a retrouvé notre fierté nationale et dorénavant Madagascar sera connu quelques choses de bien. Espérons que tous les malgaches prendront en exemple ce qu’ils ont vécu et ce qu’ils ont fait.
    Alefa Baréa

  • 11 juillet 2019 à 15:11 | kartell (#8302)

    L’engouement général pour le parcours sans faute des Barea donne à cette société en attente de résultats économiques une occasion en or d’exulter et de démontrer de quoi elle serait capable, en cas de basculement d’une société attentiste vers un quotidien plus prometteur si la gouvernance tenait enfin ses promesses...
    L’euphorie des médias est révélateur de ce que tout ce qui n’avait jamais été dit, faute d’une quelconque amorce de résultats, mais laissée en jachère permanente et qui, aujourd’hui peut être prononcée, écrite dans une sorte d’immense remerciement à ses nouveaux pionniers de l’exploit possible....
    Les excès de langage sont apparus à la une de cette presse locale dithyrambique qui peut enfin jubiler aux exploits des siens devenus les nouveaux héros d’un honneur enfin retrouvé !...
    Cet état d’extase gomme ainsi toutes les aspérités à l’origine d’une polémique, étouffée dans l’oeuf de la victoire, concernant ces double-nationaux devenus depuis des demi-dieux après avoir été que des citoyens à la petite semaine !...
    On pourra toujours dire que la victoire annihile toute forme de controverse et qu’elle ne retiendrait que la joie des vainqueurs et de leurs supporteurs mais elle donnera matière à réflexion une fois que la fête sera consommée et le résultat acquis sera interprété comme une suite logique d’avoir été les plus forts et les meilleurs...
    Plus subtilement, le pouvoir avance ses pions en sachant qu’une victoire finale constituera le graal lui permettant de souffler pendant de longs mois comme un temps béni de la digestion populaire d’une conquête aussi prestigieuse ...
    Inattendue et providentielle, cette ascension inespérée du football national donnera au paysage politique une nouvelle configuration qui, elle, va imposer à ce pouvoir, pourvoyeur zélé de la com, cette obligation absolue de réussir son pari, celui de ses promesses miroitées !...
    Car la société ne comprendra pas pourquoi son équipe nationale va monter sur la plus haute marche tandis que son président, lui, n’arrive pas à la hauteur de la toute première d’un renouveau furtif !...
    Il est moins sûr que ce succès international promis devienne aussi payant dans la durée que le pouvoir l’escompte à son seul profit car il va devoir à son tour démontrer qu’il est en capacité d’en faire autant dans son domaine réservé sans prolongations possibles, lui !....

  • 11 juillet 2019 à 15:27 | Isandra (#7070)

    Là, les Malagasy ont su montrer qu’il est possible l’union nationale et on peut être solidaire quand il s’agit de la fierté nationale,...

    En fait, cette solidarité nationale ou cohésion nationale est plus en plus perdue depuis qu’un certain politicien est entré en politique,

    • 11 juillet 2019 à 16:06 | tiryco (#9153) répond à Isandra

      Le soufflé vas vite dégonfler en cas d défaite
      Com toute cette com

  • 11 juillet 2019 à 16:14 | ratiarison (#10248)

    ALEFA BAREA FA Aza asiana resaka POLITIKA ry ISANDRA KELY SAINA na arrière tsaina POLITIKA mazava ?

  • 11 juillet 2019 à 16:16 | Isandra (#7070)

    Il faut admettre aussi que la com de ce régime joue grand rôle dans cet élan de la fierté nationale,...

    • 11 juillet 2019 à 17:55 | ratiarison (#10248) répond à Isandra

      Na nisy ny COM na tsia ny JOUEURS MIAMPY NY ENTRAINEUR no tonga @ny IZAO toerana izao Niampy ny fanampiny ny CAF +++++NYsisa Mpijapy train 🚂 ry VONGANY maivan-DOHA mazava !samy tsara

  • 18 juillet 2019 à 16:51 | plus qu’hier et moins que demain (#6149)

    Assalaamo alaikoum

    On joue au tiercé ou à quoi ? Pour faire un tiercé gagnant, il ne faut pas oublier le nom du président de notre fédération de l’époque devenu président de la CAF actuellement M. Ahmad Ahmad (objet de toutes les critiques lors des périodes de vaches maigres de notre Barea et qu’on a tendance à ignorer actuellement : Pas de Nicolas Dupuis sans Ahmad Ahmad et pas de Faneva Ima sans Nicolas Dupuis. La boucle est bouclée pour ces « Toko Telo mahamasaka nahandro »).
    Bon retour à Patrick A qui montre à travers cet article qu’au-delà de la politique, il maîtrise aussi le sport.

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