Grève du personnel : la Jirama lourdement fragilisée

La grève qui a paralysé la Jirama à partir de la mi-octobre 2025 laisse derrière elle un paysage financier et opérationnel particulièrement préoccupant. Les chiffres publiés par le ministère de l’Énergie et des Hydrocarbures témoignent d’un effondrement sans précédent des performances de la société nationale d’eau et d’électricité, déjà fragilisée depuis plusieurs années.

Alors que le chiffre d’affaires mensuel encaissable s’élève normalement à 95,4 milliards d’ariary, la dynamique s’est brisée dès septembre, avec un encaissement limité à 90,6 % du potentiel. En octobre, la chute devient vertigineuse : seulement 83,2 % du chiffre d’affaires moyen ont pu être recouvrés, soit un manque à gagner massif. En cumulé, pour les mois de septembre et d’octobre, ce déficit s’élève à près de 25 milliards d’ariary, une somme qui pèsera lourd sur les capacités d’exploitation de l’entreprise.

Cette incapacité à assurer la collecte des paiements se reflète aussitôt dans l’évolution des impayés. Les arriérés progressent jusqu’à atteindre plus de 817 milliards d’ariary fin octobre. La hausse est portée principalement par les abonnés privés, dont les impayés augmentent de 3,30 % en seulement un mois, révélant un système de relance totalement à l’arrêt et une rupture manifeste dans la gestion des relations clients.

La grève a d’ailleurs frappé de plein fouet le centre d’appels, véritable poumon du service clientèle. Le Numéro vert 547, habituellement très sollicité, s’est retrouvé déserté. Le volume d’appels reçus en octobre s’est effondré de plus de 80 % par rapport au mois précédent. Les appels traités ont suivi la même trajectoire, passant de 103 074 en septembre à seulement 18 967 en octobre. Au total, 103 815 appels ont été perdus, tandis que 95 030 n’ont jamais été pris en charge. Le taux de réponse, autrefois stable, recule nettement, alors que le taux d’abandon bondit à 18,20 %, illustrant l’ampleur de la désorganisation.

Le Back-office n’a pas été épargné. Les demandes écrites, habituellement un filet de sécurité lorsque les appels sont coupés, ont elles aussi subi une baisse brutale. L’activité diminue de 44 %, avec une chute de 33 % sur les e-mails, de 53 % sur WhatsApp et de 28 % sur Facebook. Plus de 3 500 requêtes clients n’ont même pas été saisies dans le CRM, laissant autant de dossiers suspendus dans le vide administratif.

Au terme de ces deux mois de paralysie, la Jirama apparaît alors affaiblie, désorganisée et confrontée à une accumulation de retards qui met en péril sa capacité à répondre aux attentes de ses usagers.